Comment les publicitaires contribuent à la déforestation et à l’appauvrissement de la langue française

Vous qui regardez les pub à la télé ou dans les magazines, n’avez pas idée de l’impact que la création de celles-ci peuvent avoir  à plusieurs niveaux.

Vous pensez que ces messages, qui peuvent vous sembler géniaux ou quelconques, sont juste sortis de l’imagination débordante d’un quelconque créatif, sous influence d’une quelconque substance illicite, et vendus à un client sur un coin de table dans un restaurant très cher, entre deux bouteilles de champagne millésimé. Que nenni ! Ce temps là est révolu depuis des décennies.

Désormais, les publicitaires sont des bureaucrates qui vont vous expliquer en 250 pages pourquoi vous devez communiquer en présentant votre produit dans sa couleur la plus neutre, mettons gris, sur un fond blanc, avec un texte écrit en noir. Pour peu qu’ils décident d’utiliser de la couleur, ils vont vous détailler en 25 pages pourquoi ils ont utilisé du rouge plutôt que du vert.

A ce rythme, comment voulez-vous que les forêts aient le temps de se régénérer. Car bien sur, le publicitaire est gaspilleur, il va imprimer son document de 300 pages en 20 exemplaires, un pour chaque participant à la réunion. C’est à croire que le publicitaire se sente obligé de justifier ses honoraires par le nombre de pages qu’il pond. Il en devient donc un vendeur de papier.

D’autant que son client n’a certainement pas envie de passer deux heures à lire un document qui va lui expliquer dans des termes parfois obscurs l’importance d’utiliser de l’arial plutôt que du times en typographie.

Oui, le publicitaire aime les termes obscurs, de préférence anglais, ou mieux encore, des acronymes de termes anglais.

Avant on parlait de communication media et hors media, à savoir de la communication dans les media (presse, télé, etc) ou en dehors (publicité sur le lieu de vente, opérations événementielles etc). C’était relativement clair et compréhensible.

Or le publicitaire, mu par une envie de justifier son salaire, ou juste pour montrer qu’il réfléchit beaucoup, ou par prétention, a décidé de tout chambouler. Maintenant on vous parle de communication ATL ou BTL. Oups ! des acronymes. Diantre, des acronymes de locutions anglaises ! Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué, c’est tellement plus fun.

La communication devient subitement Above The Line et Below The Line. Ca veut dire la même chose que nos bons vieux media et hors media, mais c’est tellement plus chic.

On peut briller en société, ça fait intelligent, même si des fois on ne comprend pas tout, on fait semblant.

Je viens de lire tout un document explicatif de la stratégie d’une marque avec toute une étude préalable du marché. Sur la même page on me parle de CAM et de YTD : comprenez Cumul Annuel Mobile et Year To Do. 2 acronymes, l’un français, l’autre anglais. sur la même page, avec un titre en anglais et du texte en français, ou l’inverse peut-être, je ne sais plus, je mélange tout.

Comment compliquer quelque chose qui peut être simple. Ah oui, c’est comme pour les forêts. Pourquoi participer pleinement à leur éradication et ne pas faire de même avec la langue française ? C’est quand même plus fun, on s’emmerde moins dans les bureaux. Et quitte à pondre 250 pages, autant le faire avec brio et laisser une trace dans ce monde merveilleux.

J’ai lu une autre étude sur des marques de grande consommation (eh oui, je lis beaucoup ces temps-ci)  : « 2 familles en perte sur les 10 DES PGC FLS ». Euh, quelqu’un peut m’expliquer ? Encore mieux que les sms. Plus court, ce n’est pas possible.

Là, les djeunes se font rétamer par les publicitaires. A moins que ne soit les mêmes !

Attendez, on n’a plus affaire au vieux beau bronzé arborant catogan ? A non, ça c’était dans les années 80. Aujourd’hui place à la génération « kleenex », interchangeable, facile d’utilisation, pleine de ressources, mais qu’on oublie rapidement. Alors il lui faut laisser une empreinte, quelque chose qui nous fait penser à elle chaque fois qu’on s’arrache à comprendre son charabia.

Il ne me reste donc plus qu’à retourner à l’école réapprendre ce qui découle du bon sens pour pouvoir vous l’expliquer en 300 pages. Suite au prochain épisode.

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